Les femmes trompent-elles comme les hommes ?

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Les femmes trompent-elles comme les hommes ?

Vivre et assumer des aventures extraconjugales n’est plus un privilège du genre masculin. Mais si les femmes ont gagné le droit d’être infidèles, nous continuons à penser que leur adultère est plus « grave » que celui des hommes.

Un deux pièces dans le Marais, à Paris. Un ordinateur allumé sur le bureau. Deux coupes de champagne sur la table basse. Tapis au sol, épais rideaux aux fenêtres, l’endroit est chaleureux. Un nid douillet pour un drôle d’oiseau. Frêle et blond. Qui, dans un sourire, explique calmement que le butinage amoureux fait partie de sa vie. « Je suis infidèle, c’est dans ma nature. La personne avec qui je vis le sait, et je sais que c’est douloureux. Mais mes écarts n’ont rien à voir avec l’amour que je lui porte. Mon couple est nécessaire à mon équilibre… Autant que mes aventures. Quand je vais voir ailleurs, je le fais pour moi. Ça me rassure sur ma séduction et sur ma liberté. Je disparais parfois plusieurs jours, mais je reviens toujours. Faire un tour dehors me permet de voir à quel point je suis bien dedans. »
Les mots d’un coureur, le sempiternel refrain d’un don Juan, l’éternel couplet d’un Casanova… Mille fois entendus. Sauf peut-être dans la bouche d’une femme. Car le drôle d’oiseau est une oiselle. Pas une amoureuse éperdue en quête d’absolu, pas une infidèle douloureuse, piégée dans sa condition de femme. Non, une femme d’aujourd’hui. Maïna Lecherbonnier, 34 ans, Parisienne, indépendante, assumant ses désirs, revendiquant son plaisir. « Libre, et libérée par l’adultère », dit-elle lorsqu’elle évoque sa toute première incartade. Il y a dix ans, celle-ci lui permit de quitter son mari : « C’était une renaissance, une révélation. » Au point de vouloir apporter, dans son Éloge de l’adultère (Éditions Blanche, 2007), une pierre de plus à l’édifice de l’infidélité au féminin, éclairé d’un jour nouveau par Françoise Simpère (auteure d’Aimer plusieurs hommes (Pocket, “Évolution”, 2004)) ou Catherine Millet (auteure de La Vie sexuelle de Catherine M. (Seuil, “Points”, 2002)).

Volages, jouisseuses, gourmandes

Chacune dans leur registre, ces trois femmes alignent les amants avant de les coucher sur le papier. Sans honte, sans cruauté non plus. Parfois amoureuses, parfois moins. Volages, jouisseuses, gourmandes, elles -prennent leur plaisir là où elles le trouvent, sans culpabilité… Et elles reviennent au port, là où les attendent leurs compagnons. En un mot, elles trompent comme des hommes. Ou plutôt, suivant des modalités que l’on pouvait croire majoritairement, voire naturellement masculines.
Des stéréotypes dépassés ? Sans doute, si l’on regarde les statistiques. Maïna, Françoise, Catherine sont la partie visible de l’iceberg. La plus extrême. Mais sa base s’élargit. Selon la dernière grande Enquête sur la sexualité en France (dirigée par Nathalie Bajos et Michel Bozon (La Découverte, 2008)), 34 % des hommes admettent au moins une aventure, pour 24 % des femmes – chiffre qui ne cesse d’augmenter ! L’écart reste important, mais se réduit. Nathalie Bajos, qui a codirigé l’enquête, juge que « l’un des changements majeurs de ces dernières décennies est sans conteste le rapprochement de la sexualité des hommes et des femmes. On le voit aussi bien à l’âge du premier rapport qu’au nombre de partenaires ou à la diversité des pratiques ».
En toute logique, cette tendance à l’indifférenciation touche donc aussi le chapitre de l’infidélité. Comme les hommes, la majorité des femmes travaille. Indépendantes financièrement, elles savent se débrouiller lorsque leur aventure les conduit à la rupture. Surtout, elles ont une vie sociale : les tentations sont désormais aussi nombreuses pour elles que pour les hommes. « Dans ces conditions, personne n’est à l’abri d’un faux pas, prévient la sexothérapeute Laura Beltran. Quantitativement, nous sommes potentiellement égaux en la matière. En revanche, le regard que la société porte sur ces écarts, le poids qu’on leur accorde est très différent pour les femmes. »
La fidélité reste un idéal pour la plupart d’entre nous, hommes ou -femmes. Pour tous, l’aventure extraconjugale est une exception, un accident. La thèse (Caractéristiques et significations de l’infidélité conjugale contemporaine de Charlotte Le Van (parution prévue en 2009).) conduite par la sociologue Charlotte Le Van le confirme : « Hommes et femmes pensent toujours que l’infidélité féminine est plus grave, parce que les femmes seraient forcément amoureuses de leur amant. » Une idée reçue ? Pas uniquement.

Forcément amoureuses ?

La gravité de l’adultère féminin, pendant des siècles sans pilule, résidait d’abord dans l’éventualité d’une grossesse. Mais si la réalité des alcôves change et les statistiques évoluent, « les représentations collectives, elles, sont étonnamment figées, constate Nathalie Bajos. On inscrit toujours la sexualité des femmes dans la conjugalité et l’affectivité. D’ailleurs, quand on demande à celles-ci le nombre de partenaires qu’elles ont connus, elles ne parlent que de ceux qui ont compté, tandis que les hommes déclarent la totalité de leurs partenaires sexuels. Ils y sont encouragés car, selon les croyances collectives, la sexualité masculine doit être active et diversifiée. On continue de penser que les hommes ont des besoins physiques plus importants. »
Ces idées reçues trouvent leurs racines dans la psychologie individuelle et collective. « Le sexe de l’homme se voit, se mesure, se compare, souligne le psychanalyste J.-D. Nasio, auteur de Mon corps et ses images (Payot, 2007). Dès l’enfance, les garçons développent un rapport à la sexualité fondé sur l’action et la compétition. Ce sont des prédateurs, et ils sont dans la performance. » Voilà pourquoi ils peuvent être plus facilement représentés dans une stratégie de conquête. Les femmes ont une trajectoire toute différente. « Ce sont elles qui sont pénétrées, il leur faut donc être en confiance pour s’ouvrir, fait remarquer la psychologue Alexandra Choukroun auteure de Si tu m’aimes, trompe-moi?! (L’Archipel, 2005). D’où l’importance de l’affectif dans leur sexualité. Elles y sont poussées par leur éducation, qui valorise l’expression des sentiments et de l’émotion. »

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