Selon des chercheurs américains, les hommes sont bien plus enclins à dépenser leur argent lorsqu’ils perçoivent que les femmes sont moins nombreuses dans la population. La raison ? Ils veulent se donner plus de chance de séduire une partenaire… Ou comment l’argent est un moteur de la sélection sexuelle.
L’Homme n’est décidément pas une exception. Alors que dans le monde animal, de nombreux mâles se démènent pour tenter de séduire les femelles par tous les moyens à leur portée (combats, danses, statut social…), une étude vient de montrer l’une des manifestations de la sélection sexuelle dans l’espèce humaine.
Dès que le sexe-ratio tourne à l’avantage numérique de la gent masculine, c’est-à-dire quand il y a plus d’hommes que de partenaires sexuelles potentielles, ces messieurs deviennent moins hésitants à dilapider leurs économies.
C’est du moins ce que montrent des chercheurs de l’université du Minnesota(États-Unis) dans leur travail de recherche publié dans le numéro de Janvier 2012 de la revue Journal of Personality and Social Psychology.
Les hommes épargnent moins et empruntent plus
Pour valider leur hypothèse, les scientifiques ont eu recours à des sujets des deux sexes auxquels ils faisaient lire des articles évoquant soit une population locale plus fournie en hommes ou à l’inverse, une ville plus peuplée par les femmes. À la fin de la lecture, les chercheurs demandaient à leurs cobayes combien d’argent ils souhaitaient économiser chaque mois et combien ils seraient prêts à emprunter tout de suite.
Les chimpanzés se battent aussi pour l'accès aux femelles. Les combats entre mâles peuvent être parfois très violents, mais rarement mortels. Sauf dans le cas où un individu mâle étranger tombe sur un groupe voisin... © JoyTek, Flickr, cc by sa 2.0
Les résultats sont très clairs. Lorsqu’on leur fait croire que les femmes sont moins nombreuses que les hommes dans la population, ceux-ci sont enclins à épargner 42 % d’argent en moins et à faire des emprunts 84 % plus importants.
Des effets du même genre sont constatés dans une expérience analogue. Cette fois, il s’agit de photos montrant trois situations différentes : plus d’hommes, plus de femmes, ou un nombre égal des deux. Après observation de ces photos, une question leur était posée : préféraient-ils disposer de 20 euros immédiatement ou de 30 euros à la fin du mois ? Ceux qui avaient vu les photos comportant moins de femmes choisissaient de prendre l’argenttout de suite, contrairement aux autres.
Des différences de 2.765 euros par mois
Les auteurs sont allés encore plus loin dans l’analyse. En récupérant des archives des populations de 120 villes des États-Unis, ils ont calculé lessexes-ratios. En parallèle, ils ont comparé les dépenses effectuées par les hommes célibataires ainsi que leur taux d’endettement.
En parfaite concordance avec leurs résultats expérimentaux, ils ont trouvé là encore une même corrélation. Par exemple, à Columbus, dans l’État de Géorgie, on trouve en moyenne 1,18 homme célibataire pour une femme. À Macon, à 150 kilomètres de là, ce même rapport était de 0,78. Les hommes de Columbus dépensaient en moyenne 3.500 dollars (soit un peu plus de 2.765 euros) de plus chaque mois que leurs compatriotes de Macon…
Et les femmes ? Chez elles, les sexes-ratios ne jouent pas sur leurs dépenses... En revanche, ils affectent leurs exigences vis-à-vis des mâles. Lorsqu’elles sont minoritaires, elles s’attendent à recevoir de plus beaux cadeaux de leurs courtisans. Tout concorde parfaitement.
Charles Darwin, le père de la théorie de la sélection naturelle, est également le premier à évoquer la sélection sexuelle dans La filiation de l'Homme publié en 1871. Comme les êtres humains choisissaient leurs partenaires, il en a déduit que les animaux ne s'appariaient pas non plus par hasard. © J. Cameron, DP
La sexe-ratio, un facteur de la sélection sexuelle
« Les théories économiques nous disent que l’Homme prend ses décisions en réfléchissant attentivement à ses choix, justifiant ainsi l’idée que nous différons des animaux sur ce point, commente Vladas Griskevicius, l’un des auteurs de l’étude. Il s’avère que nous partageons beaucoup plus que ce qu’on ne pense avec les autres animaux. Certains de nos comportements sont inconscients et de l’ordre du réflexe. »
Il n’y aurait finalement rien d’étonnant à établir ce genre de constat. Nos cousins chimpanzés tentent de se servir de leur statut social, acquis par la force ou la ruse, pour s’attirer les faveurs des femelles. Nous avons inventé un moyen supplémentaire pour montrer notre puissance : l’argent, que leshommes utilisent dans le même but.
Cependant, il faut se prémunir de conclusions trop hâtives. Les hommes ne deviennent pas impulsifs au point de s’endetter complètement, pas plus que les femmes ne sont vénales. Des paramètres culturels peuvent aussi entrer en ligne de compte. N’inculque-t-on pas l’exemple de l’homme galant au service de ces demoiselles ?